" Dieu a inventé la calvitie pour rendre les Hommes plus humbles. "

samedi 27 juin 2015

Projet collaboratif : Amandine


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Je ne sais plus comment s’est arrivé. Impossible de dire si la chute a été diffuse et si ça a duré pendant des années avant que je m’en aperçoive. Je n’étais pas vigilante sur une éventuelle perte de cheveux, tout simplement parce que pour moi, une femme, ça ne pouvait pas perdre ses cheveux.  Elle aurait l’air de quoi, Raiponce, sans ses cheveux ? Pouf, plus de suspens et de fin heureuse, enfermée ad vitam aeternam dans sa tour, l’alopécique ! Et puis, un jour, j’ai remarqué qu’ils tombaient vraiment beaucoup. On était à l’automne, je me suis dit que c’était normal. En février, je la trouvais longuette cette chute automnale qui mordait méchamment sur l’hiver…  J’avais 28 ans.
Rapidement, j’ai passé un test sanguin et hormonal. Rien, normalité absolue. Et puis un diagnostic est  tombé du ciel, comme ça : c’est une AAG.  « C’est-à-dire ? Comment ça, mes cheveux vont tomber ? Je sais qu’ils tombent puisque je suis là, mais sinon la chute, elle s’arrête quand ? Non, mais je veux dire, elle s’arrête quand pour de bon ? Bon, je crois que vous n’avez pas bien saisi ma question, ok, j’ai un problème de chute de cheveux mais quand est-ce que ça s’arrête ce cirque et qu’on n’en parle plus jamais ? Pourquoi vous riez, Docteur ? »…

Au début, je n’ai pas compris que l’AAG et moi, on allait être les Worst Friends Forever.  Je pensais que je pourrais la dégager rapidement ma copine-boulet. Je n’avais pas compris que la Garce, une fois qu’elle t’a mis le grappin dessus, elle ne te lâche plus jamais. Je suis vite passée sous Minox , en pensant que ce serait temporaire, parce que ce truc poisseux qui te fait les cheveux gras, ce n’est pas possible. Je me souviens avoir envoyé ma mère chercher mon ordonnance de Minox, car j’avais un peu honte. Je me souviens aussi avoir été super énervée quand elle est revenue avec un pack de 3. Comment pouvait-elle raisonnablement penser que j’allais appliquer ce truc toute ma vie ?! Les mères, elles sont archi nulles parfois, elles ne pigent rien…

Après, je suis entrée en phase 2 : lendemain qui déchante. Après m’être « illusionnée » et avoir refusé de comprendre, l’info a soudain décanté et là j’ai commencé à avoir des angoisses. Je me cauchemardais chauve et repoussante. J’avais des crises de larmes, je demandais 20 fois par jour à mon copain, s’il continuerait à m’aimer quand j’aurais la tête d’un moine tonsuré du XIIIème siècle.

Puis, une phase 3 avec des doutes, des interrogations et des révoltes. Comment peut-on être sûr que c’est une AAG quand tous les tests sont normaux ? Comment peut-on dire que c’est génétique ? Ce ne sont pas les 2 gros chocs psycho que je me suis pris de plein fouet à 29/30 ans qui ont déclenché ce machin ? Pourquoi moi ? On est nombreuse comme ça ? C’est pas juste ».  Je ne suis déjà pas miss monde (ni miss France, ni miss Nord Pas de Calais, ni miss Dunkerque, ni miss Maroille) et en plus on me colle ce machin ? D’ailleurs qui me colle ce machin ? Auprès de qui, faut-il que je me plaigne ? Non, mais là faut être sérieux les gars, la coupe est pleine, distribuez votre générosité ailleurs, moi j’ai déjà donné. Houhou ? Il y a quelqu’un ??? Ben non, il n’y a personne et tes cheveux tombent toujours.
Après 1 an, avec Minox, mon Best Friend Forever, je me faisais un nouvelle super meilleure copine, la Cyprotérone (Androcur).  Vraiment, très chouette et pleine de petites attentions envers moi. Déjà, plus un bouton, ni même un point noir. Le poil devient si rare et si clair que s’épiler pourrait paraître superflu. Effet magique pour les cheveux : ça ne rend pas la densité mais ça ralentit la chute (mais on continue Minox quand même). Quelques petites frayeurs quand même avec ma Cypro, car suite à un mauvais dosage, j’ai eu des règles hémorragiques et surtout, l’effet secondaire pas terrible quand on vit à 2 : une libido moribonde. Plus rien de rien. Pour donner une idée, même toute nue dans un lit avec Ragnar Lothbrok, tu préfères lire un chapitre du Capital au XXIème siècle avant de lui taper une bise sur la joue en lui souhaitant une douce nuit ( et pourtant, ce n’est pas l’effet qu’il me fait ce Ragnar en temps normal). 5 ans après, j’en ai eu marre de toute cette chimie et j’ai décidé d’arrêter. Et là…ça a été un peu le Rocky Horror Picture Show qui te saute dessus. Des pustules XXL dont même des adolescents en plein bouleversements hormonaux n’oseraient pas rêver, et cherry on the cake, une perte de cheveux atroce/monstrueuse/effroyable/abominable…avec certains jours de grâce, un perte de plus de 400 cheveux par jour .

Et maintenant, j’en suis où… ? La cause, je m’en contrefous. Je ne veux pas devenir médecin à la place du médecin. Ce que je veux,  c’est une solution et si possible rapide, car mes cheveux, eux, restent remarquablement constants dans leur chute. L’AAG, c’est une saleté cyclique. Il y a des phases de répit et des phases télogènes. Ca je ne maîtrise pas, et j’ai horreur de ne rien maîtriser. Je sais que lorsque j’ai un gros stress, 3 mois après, je vais le payer. Et puis des fois, je me sens vraiment bien, et pourtant ça tombe quand même.

Cette AAG, c’est ma honte. Je la cache comme un syphilitique l’aurait fait au XIXème. Et même tous les raisonnements à froid du monde n’y font rien : certes, ce n’est pas de ma faute, et ce n’est pas mortel (et je rajoute la culpabilité de se lamenter sur une tare disgracieuse, alors que d’autres luttent contre de vraies maladies). Je n’assume pas, je fuis mon image dans la glace, et sur les photos. J’ai peur de la pluie, je crains le vent, je redoute le soleil, les spots me terrifient. Parfois, je me dis que ça pourrait être super chouette d’être un vampire et ne vivre que dans la pénombre.  Ces cheveux, c’est une souffrance psychologique au long cours  Si je pouvais, je lui ferai un procès pour harcèlement moral à cette alopécie.   

Mon AAG, c’est un secret. Personne ne le sait ou presque (ma maman, ça compte ? et mon copain ?). Souvent, je remarque que l’on me regarde dans le cuir chevelu. Les gens ne sont pas discrets. Moi, je pourrais être formatrice en détection visuelle d’AAG (on est d’accord, ça n’a aucune utilité). Je suis championne du monde pour repérer une AAG à 100 mètres, rien qu’à la texture du cheveu. D’ailleurs, je suis surentrainée, car un de mes tics, c’est de regarder les cheveux des femmes. Je déteste cette obsession mais c’est devenu un réflexe quasi Pavlovien. Quand je n’avais pas ce problème, je me concentrais sur autre chose. L’AAG est devenue assez centrale dans ma vie. Et même si je n’ai pas envie d’y penser, j’y suis parfois obligée. En phase de chute, c’est insupportable, car même si je ne veux pas y penser, ma tête se rappelle à mon bon souvenir. Mon cuir chevelu me gratte et picote. Je pourrais me le gratter jusqu’au sang (ce qui ajoute à mon charme, car je souffre en plus d’une AAG, d’un red scalp syndrom).

Mon AAG, c’est ma souffrance. Je suis une nana dynamique, ouverte, participative, enjouée. Mais cette putain de tare, elle me lamine parfois. Ces cheveux qui sont partout sur moi ou autour de moi mais plus vraiment sur ma tête, j’arrive à les haïr. Je voudrais me raser la tête pour ne plus en parler.  Tout en sachant que cela n’ôterait en rien la souffrance que je peux ressentir. Parce que mon modèle reste assez traditionnel. Une belle femme, c’est un ensemble de facteurs et un de ceux-là correspond aux cheveux qu’elle peut avoir. Alors si une belle femme est une femme à cheveux, qui suis-je dans tout ça ?!

Amandine


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2 commentaires:

  1. Superbe témoignage, enfin si un témoignage sur l'aag peut-être superbe ...
    Je n'ai pas vécu tout se que tu as vécu car je ne pourrais jamais prendre la Diane ou androcur &co suite à une embolie pulmonaire.
    Mais comme toi je repère l'aag a 100m, je vois des filles touchées qui sont très jeune.
    Comme toi toujours je ne sais pas comment m'accepter maintenant que je ressemble a la boule de fort Boyard mais ton histoire m'aide un peu car je ne suis pas la seule .

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  2. Coucou,
    Ton témoignage m'a vraiment émue... Je suis de tout coeur avec toi, même si je ne te connais pas personnellement. Moi aussi, je suis touchée par cette saloperie mais je suis encore sous pilule. Je ne veux pas passer sous androcur pour les effets dont tu parles. J'ai jasmine mais je suis très sceptique sur l'utilité... Je me demande même si ce ne sont pas les pilules qui dérèglent et créent l'alopécie car personne n'est touché dans ma famille. Qu'as-tu désormais comme traitement? Es-tu au naturel? J'aimerais arrêter la pilule car j'arrive sur 38 ans mais j'ai peur du rebond acné-cheveux...
    Je crois que malheureusement la solution réside dans l'acceptation et tout le travail psychologique qui en découle.
    Je te souhaite beaucoup de courage! Et merci pour ton témoignage!!!

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